Cher Embryon (car c’est bien comme ça qu’on commence un écrit, non ?),
J’ignore encore si tu survivras. Je n’ai jamais été de constitution très solide. Peut être que cette aventure ce terminera bientôt. Peut être qu’elle ne fait que débuter.
Ça ne fait pas très longtemps que tu es en moi, mais je sens déjà ta présence. Mon instinct protecteur est déjà enclenché, mes hormones ébranlées. Mon corps change. Je me doute que tu es là depuis déjà deux semaines. Mais je ne voulais pas l'admettre. Même si j'ai maintenant la confirmation, j'ai encore de la difficulté à le faire. Vois-tu, j’ai peur. Énormément.
Tu ne naîtras pas dans la famille que je t’aurais souhaitée. Lorsque je m’imaginais mère, je m’imaginais plus âgée, avec une carrière ainsi qu’un mari. Une maison. Un jardin. Moi, c’est ce que j’ai eu. Je souhaiterais que ça soit ton cas également. Je souhaiterais que ton terrain de jeu soit une forêt. Je souhaiterais pouvoir te donner l’abondance, te donner lune et étoiles. J’aimerais que tu puisses courir dans la maison, en ayant hâte de raconter ta journée à l’école à ton père et moi.
Tu n’es qu’un moustique dans mon ventre, mais déjà te voilà très imposant. Oh, ça oui. À peine un mois, et tu es capable de déstabiliser mon organisme ainsi que moi-même. Tu as déjà des désirs qui grandiront dans les mois qui suivront.
Je ne dirais pas que je suis en colère contre toi. Plus contre les évènements. Tu auras une mère de 18 ans, à peine émancipée, qui vit en loyer financé par ses parents à elle. Une mère qui est en train de terminer son pré-universitaire. Qui n’est pas une adulte elle-même.
J’ignore si tu auras un père. En ce moment, c’est mal parti. Si je savais au moins où il est..
Je t'écrirais le mois prochain. Pour te dire ce qui en est.
Maman (qui ne croit pas en l’avortement)