I want to patch my soul on your brain

Un journal de Journal Intime.com

Archive du journal au 27/12/2014.

Sommaire

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28 septembre 2008 à 20h54

Alors voilà. Début, commencement, départ, ouverture: naissance. Comment en sommes-nous arriver là? Vous, moi. Nous, tous ensemble.Commentquipourquoiquoipardonplaît-ilhein?

Rembobiner. Recommencer.

Play.

2*]

28 septembre 2008 à 20h55

En ce temps, la fin justifiait le commencement, et vous, vous en étiez un bout, de cette fin. Vous aviez encore des projets en ce temps: la société, le globe où vous existiez, l’humanité entière, l’univers lui-même, tout laissait à croire que tout était possible, que tout était envisageable, tout pouvait être plausible, tout semblait concevable, tout n’était qu’idée féconde: tout, tout, tout. Vous n’étiez pas seul, je vous rassure, vous n’étiez même jamais seul: jamais auparavant, l’espèce humaine n’avait été tant portée vers l’avenir: futur, vie nouvelle, recommencement: rêves d’une génération androgyne surmédiatisée. On espérait, on calculait, on souhaitait, on languissait, on attendait, pronostiquait, désirait, attendait encore, on convoitait, on ambitionnait, aspirait, visait, on attendait, on attendait. On attendait. Vous aviez attendus vous aussi, bien sûr. Vous aviez attendus tellement de choses inutiles, impossibles, chimériques et inconcevables, des choses qui ne sont jamais arrivées, des choses utopiques et insensées, dont vous auriez ri volontiers si vous aviez su; mais vous aviez attendus. On attendait et rien ne venait, mais l’on continuait d’attendre, comme si le temps changerait tout, comme s’il pouvait nous donner une force additionnelle; on attendait comme les autres, comme on avait toujours fait, comme on ferait encore.

3*]

28 septembre 2008 à 20h57

Il ne fallait surtout pas se contenter de ce qu’on possédait, non, il nous fallait toujours plus pour toujours sembler mieux: toujours vouloir pour toujours exister. L’homme ne voulait que paraître dans un monde d’écran plats, un monde de photographies pigmentées sur papier glaçant, de logiciels intelligents et livres virtuels, boulevards et gigantesque buildings bitumés, monde de femmes fatales illusoires sur talons aiguilles, de contraignantes souscriptions mensuelles à régler, de commémorations annuelles sur fond de romance schizophrène - que sais-je: il n’existait que dans le reflet de son téléphone dernier cri. Il était miroir de ses émotions et catadioptre des incohérences du monde. Il bouissait intérieurement, mais se contenait, convoitant à tout prix - et au meilleur si possible, bien entendu - l’apparence la plus retouchée. Vous n’étiez alors qu’image éphémère parmi ce monde de négatifs à grands tirages. On n’arrivait que douloureusement à s’extraire de sa misérable vie, mentant à ses semblables pour une question de conservation disait-on. L’homme paraissait herculéen mais n’avait jamais été pareillement vulnérable: il n’était que paradoxes vivant, être en constante décomposition, seul parmi des milliard de frères identiques à lui, à vous, à moi. Oui: surtout moi. On avait alors qu’une issue pour émerger: le mensonge pour paraître, le mensonge pour exister, pour vivre: pour respirer. Il mentait partout: les gens qu’il croisait, ses connaissances, ses proches, sa famille, son être bien-aimé, lui-même, lui, son propre corps idolâtré: tout y passait. Vous étiez menteurs à plein temps, sournois mythomanes en continu, perfides-et-fourbes-hypocrites-humains-comédiens-en-préretraite… J’aime ce titre. J’en ai hérité, bien sûr, tout comme vous. Toute la difficulté réside dans le fait de savoir quand s’en libérer à temps, mais n’anticipons pas, voulez-vous? Car c’est vous-même qui m’intéressez: vous n’aviez jamais été tant ingénieux et créatif qu’à cette époque, à croire que le mensonge est profitable. Pendant cette période, on pensait des projets absurdes pour des lendemains déraisonnables. On visait des réalisations extravagantes pour être assuré d’en arriver au quart, la fin n’étant qu’une idolâtrie pour tromper les autres, les siens, soi-même. Vous connaissez cette musique: surtout soi-même.

4*]

28 septembre 2008 à 20h58

Tromper, mentir, abuser, illusionner, trahir, dissimuler, accuser, monnayer, négocier, solder, liquider: le monde avait bon goût. Le goût connu du sang rouge vif dans la bouche de l’innocent. Vous êtes l’innocent. Je suis la goutte de sang. Vous ne comprenez encore rien.

Vous me questionnez: qu’as-t-on ? Innocent comme vous, je répondrai volontiers sincèrement que tout finirai par passer, qu’il ne s’agit simplement la que d’une « phase par laquelle l’homme et ses semblables doivent passer pour s’améliorer et s’épanouir » et que de toute façon, tout finit toujours par passer et que tout s’oublie avec le temps. Mais c’eu été considérablement facile; trop, beaucoup trop.

5*]

28 septembre 2008 à 21h01

Le mal du siècle ? Les souvenirs d’avant, le réveil difficile d’hier, l’ennui d’aujourd’hui, de demain. Qu’y pouvait-on ? On ne savait pas encore… Qu’aurait-on pu penser à notre place ? Qu’auraient-on fait si l’on avaient eu le choix? Fallait-il changer? Auriez-vous pu changer à ce point? En auriez-vous eu la force et l’envie, la détermination, la résistance? Pouvions-nous deviner? Aurions-nous pu avoir le recul nécessaire? Qu’aurions-nous pu faire, vraiment? Il fallait rentrer dans le moule: se montrer, se pervertir, se maquiller pour ne laisser apparaître qu’une face imagée de notre réalité, se déguiser encore, parler haut et fort, rire pour une imposture, sourire forcé, montrer des dents blanches détartrées… Ils voulaient la célébrité, la gratitude, l’argent, les voitures, les filles, les grandes, les blondes, la sensualité, le plaisir, la drogue, les garçons, les sportifs, des beaux, des moches, l’euphorie, le sexe, la jouissance, des filles encore, encore plus de drogues s’il vous plaît, recommencer: d’autres drogues, d’autres filles, d’autres garçons, d’autres jouissance et recommencer encore et encore: le bonheur. Que pouvaient-ils imaginer? Tout. Dans l’ordre mathématique des choses, tous voulaient qu’on les laisse tranquille comme des mortels normaux, exigeant un retour à la vie d’avant. Et le cycle décrit plus haut reprenait placidement son cours avec les mêmes spécimens ou leurs successeurs respectifs, comme bon vous semble. Ne leurs avaient-on pas dit que tout n’était pas associable, surtout pas le mot bonheur avec un autre? Surtout pas le mot bonheur. Bonheur. Bonheur. Bonheur et Bonheur. Le monde n’était alors qu’illusion de ceux qui le constituaient, et, finalement personne ne trouvait son compte ni quoique ce soit. On tournait volontiers en rond en cherchant le fin mot de l’histoire. On cru parfois trouver celui-ci en haut de l’échelle du bonheur: ce ne fus que pour tomber d’un point plus élevé. Oui, vous connaissez la maxime, j‘en suis sûr: « Plus on s’élève et plus dure sera la chute ». Ne riez pas: il semblait avéré que le monde humain ait été programmé par ces trente trois lettres gravées profondément, par entailles précises, aux ciseaux acerbes dans la mémoire vive de chaque humanoïdes. Voyez-vous le fin mot arriver? J’oubliai: non, vous y êtes encore, là-dedans. Prenez vos pilules. Prenez-les. Ne les oublier surtout pas. Les bleues, oui.