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Mon ticket pour le bonheur

1 janvier 2013 à 20h16

Je suis parti. Le vent qui soufflait doucement sur mes cheveux m'encourageait à poursuivre mon choix. Rien ne me retenait ici. Les arbres se basculaient sur un air d'au revoir. Plus rien ne me retenait ici. Les amis n'étaient que des personnes, les sentiments n'étaient - à mon grand désespoir - pas plus fort que mes rêves. Ma valise ne contenait que des habits, ma boîte, et mes espoirs. Autant dire qu'elle est presque vide. Des espoirs, je n'en ai qu'un : être heureuse. Et c'est dans l'espoir de le réaliser que j'ai pris cette décision. Je marchais une dernière fois au bord de ce fleuve. C'est fou que ce que l'on passe à côté de merveilles avec la routine. Il faisait froid, il avait plu la veille. Le ciel n'était réduit qu'une palette de gris clairs, ce qui dégageait une certaine mélancolie. Je marchais sans me retourner mais avec lenteur. Puis, pris d'une soudaine peur, j'abandonnai mes affaires pour aller me percher en haut de l'écluse. Plus personne n'y venait depuis que l'hiver était arrivé. D'ailleurs plus personne ne prenait la peine de venir ici tout court. Les gens sont pressés, ils courent tout le temps. Je m'assis dans la neige, là. Les flots de gens qui coulaient sur le pont me faisaient rire. Je prenais un plaisir fou à le regarder. Non pas parce que je me moquais, non, c'est juste que moi aussi j'avais été comme eux il y a quelques temps. Mais j'étais fière, car j'avais réussi à en sortir. J'étais l'oiseau solitaire du ciel, qui allait et venait. Rien que cela. C'était énorme pour moi.

Je commençais à avoir tout de même un peu froid. Je rangeai ce souvenir au fond de ma mémoire, jamais je ne voudrais l'oublier. Je marchais d'un pas toujours plus rapide, vers la gare. La plupart des gens prennent le train tous les jours, cela devient même une corvée. Mais moi, non, c'était au contraire une découverte, une surprise. Quel était le prochain train pour Londres ? Je ne savais pas, mais j'allais acheter un ticket. On m'appris qu'il n'était que ce soir. Bizarrement, je n'étais pas déçue, mais heureuse. Cela me faisait comprendre qu'il me restait une journée pour profiter, revoir, encore et encore, les merveilleux moments que j'avais passé ici. Même si je veux partir loin, je ne peux pas contredire que ma vie a été ici. Je n'hésita pas une seconde de plus, je partis à la rencontre de mes souvenirs.

A chaque endroit, à chaque coin de rue, je me rappelais. Des fous rires avec mes amies, des parfums de glaces des vendeurs ambulants, de tous ces petits bruits de la ville. Et du calme et de la sérénité que dégageait les hauteurs de la ville, et la vue de ces centaines cheminées biscornues qui jetaient de la fumée dans le ciel gris. Je passai à présent dans la rue principale de la ville. Celle où il y a toutes les boutique de vêtements de marque, celles que je fréquentais pas plus tard que l'année dernière. Mais cette époque était tellement loin. Un nombre considérable de choses s'étaient passées depuis. Je l'avais rencontré, et il avait à jamais changé ma vie. Mais il était parti, et j'avais appris avec le temps que de ne garder que le positif de cette idylle. On sait tous les deux que nous nous retrouverons de toute façon, et c'était peut-être aussi pour raccourcir - ou rattraper - le temps, que je fuyais, moi aussi, mes racines. J'avais pu aussi et enfin courir. Mes jambes ne m'en empêchaient plus. J'avais donc repris la compétition, mais plus par besoin, par plaisir. J'avais aussi arrêter de cacher ce que j'étais. Désormais, j'assumais. Les coups de huit heures sonnèrent lorsque je commençais à m'apercevoir que j'allais louper mon train. Je couru en un temps record jusqu'à la gare.

Le vent me frappait les joues, j'avançai vite, à contre sens du vent, à contre sens du temps. Elle allait trop vite, filait à toute allure dans les rues de la ville. Sans doute pressée. Je commençai à sortir mon ticket de ma poche, pour ne perdre de temps. Le vent soufflait de plus en plus fort. Je courais, encore et encore, comme les gens du pont. Le ticket m'échappa brusquement des mains. Je fis machinalement demi-tour pour le ramasser. C'est ainsi que j’atterris sur ce passage piéton, celui qui est devant la gare. Elle roulait beaucoup trop vite. Elle regardait la lune et se disait qu'elle serait bientôt auprès de son mari. Elle ne vit la jeune fille qui ramassait quelque chose par terre. Elle ne pu freiner. C'était trop tard... Je regardai avec inquiétude les phares de la voiture qui se rapprochait de plus en plus de moi. Je me sentais bizarre, à la fois mal et libérée. Je me mis alors à penser à tous ces souvenirs, à cette belle journée. Et là, cela me parut comme une évidence : j'étais heureuse. Je revoyais mes amies, ma famille, lui.. Tant d'images et d'étoiles dans les yeux que de souvenirs dans mon esprit. J'entendais des gens qui criait autour de moi, une sirène d'ambulance. On me demanda si j'allais bien. Je ne répondis pas, mais mon coeur, lui, était bien, comme il ne l'avait jamais été. C'est en nageant dans le bonheur que je suis parti...