hikikomori, vivre dans l'ombre

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Archive du journal au 11/10/2018.

Sommaire

Elle est partie...

6 novembre 2011 à 2h26

Les dernières pensées que je t'ai adressé datent de juillet 2010 ( http://hikikomori_archives.journalintime.com ). Cela fait bientôt un an que je pense à t'écrire de nouveau. Mais je n'en trouve ni la volonté, ni l'envie. Ma vie s'est-elle améliorée? Je ne pense pas. Alors aucune véritable raison de te le dire. Mais un événement vient d'arriver, enfin je crois. Et je souhaite garder une trace de ce sentiment.

Je n'en suis pas certain, mais tout semble porter sur le fait que ma grand-mère vient de décéder, en ce samedi 5 novembre 2011. Et cela est ma faute.

Je vis chez mes parents. Cela fait plus d'un an et demi que vis dans ma chambre, sans en être sorti, sans communiquer avec mes proches. Pour cette raison, ma mère ne veut pas que ma grand-mère s'installe dans la maison. Pourtant, il y a la place, ma mère a du temps libre pour s'occuper d'elle. Mais ma situation semble gêner.

Grand-mère était malade ces derniers temps. Elle a exceptionnellement passé une semaine à la maison fin octobre. Pourquoi? Sûrement pour que ma mère l'accompagne chez le médecin. D'ordinaire, c'est ma tante qui l'héberge et prend soin d'elle, mais elle n'est pas véhiculé et ne parle pas bien le français.
Bref. Le premier soir où elle est arrivée, elle a toqué à ma porte et m'a demandé de lui ouvrir. Mais ma mère était à ses côtés alors je n'ai pas répondu. Elle a plus de 80 ans et n'a plus toute sa tête alors je me doute bien que c'est ma mère qui lui à souffler l'idée. Il y a plusieurs mois, elle avait aussi toqué à ma porte mais m'avait appelé par le prénom de mon cousin...
Même s'il est difficile de communiquer avec elle car on ne parle pas la même langue. C'est la seule grand-parentes que j'ai connu, nous nous sommes rencontrés il y a quelques années - il y a moins de dix ans peut-être, je ne m'en rappelle plus. Nous avons vécu dans la même maison il y a quatre ans, durant quinze mois. J'essayais de m'occuper d'elle et de la soulager dans son quotidien, enfin du mieux que je pouvais à mon niveau.
Donc, durant cette semaine, elle dormait dans la chambre adjacente à la mienne. Je l'entendais tousser à travers ma porte, parler dans son sommeil, marcher avec ses petits pas. J'étais content de la savoir à côté. Il est vrai que cela changeait un peu mon quotidien mais je l'aime vraiment ma grand-mère. Elle se levait plusieurs fois dans la nuit pour aller aux toilettes, et à chaque fois elle tournait la poignée de ma chambre en pensant que c'était les toilettes. Cela me réveillait, mais je n'était pas fâché. Au contraire, cela me faisait sourire. Et puis après avoir trouvé ma porte close, elle comprit et s'en éloignait. Sur le chemin du retour, elle se trompait au début. Au lieu de retourner dans sa chambre, elle allait dans celle de mon frère. Je suppose qu'il n'a pas trop apprécié, surtout qu'il se levait tôt pour aller travailler. Une fois, mon frère absent, ils l'ont trouvé endormi dans le lit de mon frère. Ma grand-mère, ma dernière source de sourire.
Lundi dernier, mes parents ont laissé grand-mère seule à la maison pour la première fois. J'ai pu la voir à la caméra se surveillance installée dans le séjour. Elle était assise dans le salon, elle semblait s'ennuyer. J'ai longuement hésité à sortir de ma chambre, à lui mettre la télé ou à tenter de converser avec elle avant que mes parents ne rentrent. Rien de tout cela, je suis resté dans ma chambre à la surveiller à distance. Je le regrette vraiment.

Les rares fois où mes parents me laissent la maison pour quelques heures, j'en profite pour faire ma toilette par exemple. Mes parents le savent car il se rende compte de mon passage dans la salle d'eau. Ce jour là, je ne suis pas sorti de ma chambre, ma grand-mère étant présente. J'aurais dû au moins faire semblant d'avoir pris ma douche. Montrer que la présence de grand-mère ne me dérangeait pas. Mes parents ont dû penser qu'elle me gênait. Le lendemain, elle n'était plus dans la maison. Si j'avais fait autrement, elle serait sûrement encore chez nous, et ce, depuis plusieurs mois.

Mes parents viennent de rentrer à l'instant. J'ai entendu leur voiture et je prie pour voir ma grand-mère en écrivant ces lignes. Mais non, il n'y a qu'eux. Avant de partir dans la soirée, j'ai vaguement entendu ma mère dire qu'elle partait car "grand-mère est peut-être morte". En plus, ma tante a téléphoné ce matin que les coups de 6 heures. Alors oui, je m'inquiète. En ce moment, je ne sais toujours pas ce qu'il se passe et cela va être difficile vu que je refuse de communiquer avec quiconque.

Ma mère vient de toquer à ma porte en m'adressant les mots "grand-mère vient de partir".

Voilà que je pleure. Merde quoi. Pourquoi tu n'as pas pris ma vie à la place. Je suis inutile et j'en ai fait que du gâchis.

La mort

6 novembre 2011 à 9h48

Je viens de passer une nuit blanche, comme une sorte de veillée en mémoire à ma grand-mère. Seul, dans ma chambre, à ma façon. Cela fait si longtemps que je me suis totalement fermé au monde extérieur.

J'ai réactivé mon profil facebook il y a quelque semaine, fait le grand ménage dans ma liste d'amis la semaine passée. Quoi qu'il en soit, mon profil est resté vierge jusqu'à cette nuit où je me suis senti obligé d'exprimer quelques mots sur ma grand-mère. J'utilise ce compte facebook juste pour consulter les pages de mes amis. J'ai mis à distance le peu qui est au courant de ma situation, pas étonnant que personne ne vienne me parler. Ce n'est pas plus mal comme ça.

Je ne sais pas comment ils vont réagir à ces quelques mots que j'ai laissés. Bizarrement, c'est la première fois que je suis confronté à la mort d'un proche. Il y a eu le décès d'un camarade de classe au collège, un cousin éloigné de mon père il y a quelques années, le père et la belle-mère de ma meilleure amie cette année passée, jamais eu de cas au travail. Bref, c'est la première personne proche et qui comptait à mes yeux.

Je ne sais pas comment y faire face. Je me sens si responsable. A qui en faire part? Personne. Et c'est bien de ma faute vu que j'ai rejetté tout le monde. Je l'assume.

Que vont-ils prévoir? Un enterrement? Une crémation? Dans tous les cas je ne serai pas présent. Il est inenvisageable de cotoyer qui que cela soit de ma famille, et spécialement du côté de mon tonton. Lui, l'aîné de la famille, qui travaille quant il veut, qui gagne bien sa vie et de manière illégale qui plus est, à la femme qui a toujours été mère au foyer, qui voyage souvent. Lui qui ne s'est pas occupé de sa mère, alors qu'elle en avait bien besoin ces dernières années. Rien que pour cela, je les haïs.
Mais je me hais plus encore. Je m'étais fixé un but, pouvoir s'occuper de ma grand-mère avec l'aide de ma mère. J'ai échoué lamentablement. Je l'ai laissé en province il y a quelques années, avec des personnes qui ont bien profité de sa gentillesse. Laisser volontairement une personne de 80 ans, s'occuper d'un nouveau-né toute la journée, alors que l'on peut se payer une nounou... Franchement?

J'ai trop de haine à exprimer. Pourquoi toutes ces personnes sont heureuses alors qu'elles ne le méritent aucunement. Ces histoires de karma? j'y ai cru mais finalement, ceux ne sont que des foutaises. Sauf à mon égard.

S'il faut mourir juste pour blesser toutes ces personnes, je le ferais sans hésiter. De toute façon, la mort j'y pense de plus en plus fort ces dernières années. La douleur me fait peur, la mort pas du tout. Faire de la peine à mon entourage? Certains le mériteront, d'autres moins. C'est une des raisons pour laquelle j'ai fais en sorte de m'effacer auprès de tout le monde, ainsi, peu de monde en sera affecté.

Il serait inapproprié de dire que je survis, loin de là. J'ai un toit, je mange tous les jours. Je ne vis pas non plus. Disons que je suis dans ma bulle et tant qu'on me laisse tranquille, tant qu'on ne tente pas de m'extirper de cette bulle, ça ira. C'est comme si je figeais le temps. Une manière comme une autre d'empêcher que ma vie ne s'écroule d'avantage. Ces derniers temps, ma mère a été assez insistante sur le fait qu'il soit temps que j'arrête de me cloîtrer dans ma chambre. Une chose est sûre, le jour où l'on me confronte à cette réalité que j'évite tant, je n'aurais aucunement envie de le vivre. Je me connais mieux que quiconque. Partir sera un grand soulagement. Aucun regret, pour une fois.

Regrets

7 novembre 2011 à 21h53

J'ai passé énormément de temps à dormir depuis hier. Mes cauchemars sont revenus. Mais c'est la première fois où je suis battu à mort, impuissant. Un sentiment de punition peut-être. Les autres fois, j'étais seulement sans vie, incapable de bouger.

Comme je m'y attendais, les quelques mots laissé sur facebook sont restés dans l'indifférence totale. Je ne le reproche à personne, j'ai tout fais pour que l'on m’oublie. Peut-être que quelqu'un visitera mon profil dans les jours à venir.

Et puis j'ai trouvé le moyen d'avoir accès aux pages de tous mes cousins, cousines, mon frère et ma sœur. RIEN! Aucune allusion à notre grand-mère. Mon frère a été mis au courant quelques heures après moi, mais il est de nature très réservé alors je peux le comprendre. Mais les autres? Je viens d'activer le micro intégré à la caméra du salon pour écouter les conversations téléphoniques de ma mère. J'ai pu ainsi avoir plus de détails sur les derniers jours.

Ma sœur, qui vit à l'étranger n'a pas encore été mise au courant. Elle doit passer une semaine en France à partir de la semaine prochaine, c'est à ce moment que ma mère lui apprendra. En ce qui concerne mon tonton, il est injoignable car il est encore en voyage. Lorsque ma mère lui a demandé un numéro de téléphone à sa fille pour le joindre, refus catégorique. Ma mère s'est donc trouvé obligée de le dire à sa fille afin qu'elle transmette à son père. Je ne trouve pas de mots assez forts pour exprimer toute la répugnance que j'ai vis-à-vis de cette famille. Hypocrite s'en rapprocherait le plus. Toute la famille de mon tonton ont toujours méprisé la famille de notre côté, sauf pendant un moment par intérêt. Arrêtons de parler d'eux.

Concernant ma cousine qui est en province. C'est elle qui a hébergé ma grand-mère pendant plusieurs années. Au pays, pendant la guerre civile, on peut littéralement dire que ma grand-mère lui a sauvé la vie quand elle était enfant. Ses parents étant décédés, c'est ma grand-mère qui l'a recueillie et l'a élevée. Grand-mère est venue en France pour s'occuper de sa petite-fille nouveau-née, qui a quatre ans maintenant. Ainsi, ses parents - un autre de mes tontons et sa femme, pouvaient travailler toute la journée pour ma cousine à Toulouse. Révoltant! Maintenant qu'elle ne vit plus dans la misère, ma cousine profite pleinement de sa vie. Belle maison, belle voiture, voyages à tout va. Et pour grand-mère? Une assistante à domicile et une nounou aurait été un minimum. Il faut savoir que cela se passe dans un restaurant avec les appartements juste au dessus. Grand-mère y vivait et y élevait sa petite-fille. Comme je l'ai déjà dit, j'y ai travaillé pendant quelques mois. Mon bureau se trouvait à côté de la chambre de grand-mère. J'ai installé un parc pour enfant afin de soulager grand-mère dès que je le pouvais. Le moins que je puisse faire. C'est qu'elle était têtue. Elle voulait tout le temps se rendre utile.

Je suis parti il y a plus de trois ans. Apparemment, la santé de grand-mère s'est détériorée à Toulouse. Personne ne faisait attention à son alimentation. Élever une enfant en bas âge qui court partout n'est pas de tout repos. Et vu l'état de ses mains, elle faisait aussi la plonge pour le restaurant! Quand j'ai entende cela je n'avais qu'une envie, foutre le feu à ce foutu restaurant, source de tellement de malheur comme j'ai pu en parler l'année dernière.

Maintenant, ma cousine veut ceci ou cela pour les funérailles. Hé ho, il fallait bien s'occuper de grand-mère de son vivant, ton argent se lui sert à rien. J'ai trop de haine pour continuer de parler de ces gens là.

J'en sais d'avantage sur le décès de grand-mère. Quelqu'un lui a mis inutilement des soucis dans la tête. A partir de ce moment, elle a eu des problèmes d'insomnie. C'était courant de la semaine dernière. Elle a finalement fait une sieste samedi après-midi. Elle ne s'est jamais réveillée. Même si elle est partie avec toutes ses tensions familiales, au moins elle n'a pas souffert en nous quittant. Je n'ai pas très bien compris la cause, de la tension accompagné de cholestérol apparemment.

Durant son séjour à la maison, elle semblait bien se porter, voire très bien. Je ne sais pas si je suis la raison pour laquelle, grand-mère n'est pas restée à la maison. Si j'avais agis différemment, elle serait encore là. Si j'avais agis différemment, ma mère aurait pu s'occuper d'elle depuis des mois déjà, elle grand-mère n'aurait pas tous ces soucis.

En y repensant, grand-mère était la seule personne qui pouvait me faire sortir de ma chambre. Pourquoi je n'en ai pas profité la semaine dernière quand nous étions seuls à la maison. Maintenant, il est trop tard. J'ai effacé toutes les vidéos de surveillances de la caméra la semaine dernière. Si j'avais su... Je suis allé dans sa chambre en catimini. J'ai trouvé son bonnet sous sa couverture. Le seul objet qu'il me reste d'elle. Je voulais le prendre et le garder mais s'il doit revenir à quelqu'un, c'est ma mère je pense. Alors je l'ai reposé et tant que personne ne le trouve, je peux encore aller m'y recueillir.

Maintenant que tu es partie, j'ai tant de regrets.

Repose en paix où que tu sois.

Je t'aime.

Triste

9 novembre 2011 à 9h00

Encore un cauchemar... je dois vraiment être tourmenté. Nous étions sur la route, une nationale. Des voitures roulaient à contre sens et nous les évitions. Tout d'un coup, c'est nous qui étions à contre sens et nous roulions vite. Impossible d'éviter la voiture face à nous. J'étais passager à l'arrière et mon réflexe a été de protéger la personne à mes côtés. Et puis la collision n'a pas eu lieu. Pour une raison inconnue, le temps s’écoulait en sens inverse et nous évitions le choc. Puis j'ai demandé à prendre le volant. Je passe les détails mais à la fin, on s'est fait voler la voiture par ma faute. Vraiment étrange tout cela. Moi qui n'a pas été dans une voiture depuis plus d'un an.

Hier, j'ai encore surpris une conversation téléphonique. Mon tonton qui se trouve à l'étranger à appeler pour avoir des détails sur sa mère, ma grand-mère. J'ai appris un fait qui me déculpabilise légèrement. Il faut savoir que mon tonton habite à cinq minutes de chez moi. Grand-mère était venu à la maison afin que tonton puisse lui rendre visite. Ce qu'il n'a fait qu'une fois en une semaine. Il est ensuite parti en voyage pour un mois. C'est pour cela que grand-mère à décidé qu'il était inutile de rester afin de se rapprocher de son fils puisque ce dernier s'absentait. Autant retourner sur Paris qui n'est pas si loin étant donné que nous sommes en banlieue, elle pourrait continuer à s'occuper de sa petite-fille, venue aussi s'installer sur Paris depuis quelques mois. Elle aurait pu aussi rester chez nous, avec ma mère. Pourquoi pas? Moi sûrement.

J'ai aussi appris par facebook, que le fils de ce tonton, mon cousin donc, vient encore d'être papa d'une fille née fin octobre. Ce cousin habite à 200 mètres. Pendant que grand-mère séjournait chez nous, son arrière-petite-fille voyait ses premiers jours à quelques pas. Étant donné que grand-mère n'est sortie que par deux reprises pour à des fins médicales, elle n'a donc jamais été conviées pour rendre visite au bébé. Je me demande si mes parents sont au courant. J'espère vraiment me tromper sur tout cela, mais cela ne serait pas surprenant...

Grand-mère ne se sentait pas bien en France. Aucun de ses enfants ne voulait ou pouvait s'occuper d'elle. Elle se sentait inutile. Avec le soutient de ma mère, elle songeait fortement à retourner au pays. Au moins, le climat lui était plus favorable. Quelques jours avant de partir, elle appris une mauvaise nouvelle. Je n'ai pas les détails mais il semblerait qu'elle ait perdu sa maison au pays. C'est pour cela qu'elle ne dormait plus. Elle se demandait ce qu'elle allait devenir. Qui est aller lui mettre ces idées dans la tête! On aurait pu facilement lui trouver une solution. Il faut faire attention aux personnes fragiles.

Apparemment, il y aura une cérémonie samedi matin si j'ai bien compris. Je n'ai pas plus de détail. Je ne pense pas que mes parents me communiquerons le lieu et la date, ils doivent penser que je ne sortirai pas de la maison et sûrement à raison. Ma sœur atterrit sur Paris samedi en fin d'après-midi. Vu qu'elle n'est pas au courant, elle ne sera donc pas présente aussi.

Bien triste tout cela. Mais une partie de moi envie grand-mère d'être partie. Juste pour ne pas avoir à se torturer avec tous ces soucis.

Hier, j'ai répondu au mail datant de juin d'une amie, juste pour lui dire qu'il vaut mieux qu'elle en sache le moins sur ce qui m'arrive. C'est donc la seule personne que je contacte depuis des mois.

Un mot pour les personnes qui par miracle me liraient. Le forum est volontairement désactivé. Comme ça, je peux imaginer que je suis lu sans avoir à me confronter à un forum vide. Pathétique? oui. Je l'ouvrirai un jour qui sait. La confiance n'est pas mon fort.

Mon ange gardien

12 novembre 2011 à 17h32

Cette semaine, mes parents sont beaucoup sortis pour s'occuper des funérailles. Ainsi, j'ai pu avoir la maison pour moi tout seul, et sortir de ma chambre. Mon premier réflexe a été d'aller dans la chambre ou grand-mère dormait. Malheureusement, ma mère a tout nettoyé afin de préparer la chambre pour ma sœur qui arrive samedi. Il ne restait plus rien : son bonnet, sa bouteille d'eau, sa boîte de mouchoirs... rien. J'ai cherché son bonnet partout dans la maison en vain. J'ai quand même trouvé une petite lampe de poche que mes parents lui avait confié au cas où. Je suis certain qu'elle ne s'en ai jamais servi, mais je l'ai gardée quand même.

Ce matin ont eu lieu les funérailles. Je n'y suis pas allé. On ne m'avait pas donné l'adresse et je n'avais pas de voiture pour y aller. Mais inutile de trouver un prétexte. Mes parents ont pensé que de toute manière, je n'y serais pas allé. Ce n'est pas faux. Ce n'est pas faute d'y avoir songé. Je me voyais comme dans les films, au lointain avec une capuche sur la tête pour qu'on ne puisse me reconnaître. Bref, je suis resté chez moi, la maison vide.

Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai eu envie de jouer du piano, qui se trouve dans le séjour. J'y jouais assez rarement ces dernières années, en cachette sans auditoire. Je n'aimais pas qu'on m'entende jouer. Vu les rares moments que j'avais de libre pour sortir de ma chambre, il était encore plus rare que je touchais au piano. De mémoire, cela datait d'il y a un an. J'ai d'abord cherché mes partitions. Ce n'était pas évident, elles étaient rangées au fond d'un placard. Et j'ai commencé à pianoter. Imagine de John Lennon, In my place de Coldplay, Everybody hurts de REM. Je n'ai pas trop perdu. J'y ai pris du plaisir. Je ne pensais plus à mes soucis. Puis je suis allé prendre une douche. Il était 10h50. Cela fait donc vingt minutes que la cérémonie a débuté.

Je ne suis pas croyant. Enfin peut-être que je l'ai été, d'une force supérieure, du karma. Mais je le suis de moins en moins. Je ne sais pas s'il y a une vie après la mort. Un paradis? Un enfer? S'il existe, alors je suis sûr et certain que tu es au paradis. Tu as tellement enduré. Un mari et plusieurs enfants disparus ou morts durant la guerre. Et pourtant, tu es restée courageuse et forte, même ces dernières années. Tu m'inspires un profond respect. Je n'ai jamais pu te le dire, ni te le montrer. J'espère que tu ne m'en veux pas. De même pour ne pas avoir assisté à tes funérailles. Mais le cœur y était. Je pense tous les jours à toi. La dernière image que j'ai de toi est ce moment où tu te balances sur le rocking-chair dans le salon. C'était il y a quelques jours. Tu t'amusais en étant pleine de vie. Cette image, je suis le seul à l'avoir et je la grave à jamais dans mon cœur.

S'il y a une chose à laquelle je crois, c'est en mon ange gardien. Il a été si souvent présent, peut-être prendras-tu sa place, même si je ne le mérite pas.

J'espère que tu as apprécié ces quelques notes de piano.

Je t'aime.

Laissez-moi dans ma bulle!

19 novembre 2011 à 23h28

Cette semaine a été riche en rebondissements. Je suis un peu pressé par le temps, cela sera peut-être mon dernier écrit avant longtemps, ou le dernier tout court. Pourquoi? Je vais y venir.

Que s'est-il passé cette semaine?

Samedi dernier, je consulte le facebook de ma meilleure amie. C'est mon seul moyen de suivre sa petite vie à distance. Le choc quand je me suis aperçu que je n'étais plus dans sa liste d'amis. Était-ce suite aux seuls mots que j'avais laissé en hommage à ma grand-mère? Une tristesse affichées qu'elle ne pouvait plus supporter. Pour en avoir le cœur net, je lui ai adressé un mail après plusieurs mois de silence.

Je lui ai notifié que "c'était pour rendre hommage à ma grand-mère qui est partie". Elle m'a répondu qu'elle avait fait le ménage dans sa liste mais qu'elle ne m'avait pas retiré, du moins pas intentionnellement. Il est vrai que j'ai aussi changé mon facebook en retirant mon nom de famille. Rien de grave donc, voilà l'explication. Elle n'a rien contre moi mais c'est vrai qu'elle n'a pas besoin de mes ondes négatives. Elle m'a proposé de lui parler si je le souhaitais, mais pas d' "allusions à des choses négatives et oppressantes".

Elle ne m'a pas présenté ses condoléances. L'a-t-elle lu? Était-ce intentionnel? Cela m'a trotté nuit et jour et encore et encore. Mais je ne pouvais pas lui en vouloir, au contraire. C'est moi qui ait décidé de mettre de la distance. C'est moi qui ait voulu sortir de sa vie. Cette fois-ci, elle semblait avoir pris assez de recul. Et puis, je viens de relire le mail que je lui avait adressé. Je n'étais pas assez explicite au sujet de ma grand-mère. Cela aurait pu être un anniversaire de décès ou tout simplement lié au 1er novembre. Finalement, je lui ai écrit à l'instant, vu que je ne pourrais peut-être pas plus tard.

Elle s'était rendue compte que je ne mettais plus aucun smiley alors que j'en abusais vraiment. J'ai fait attention d'en mettre plein, voire de lui faire remarquer. Je lui ai dit que tout allait bien. Je n'aurais jamais pu lui mentir, mais cette fois je l'ai fait. La confiance est à la base de tout pour moi. Jamais de mensonges aux personnes que l'on apprécie. Quelque chose est cassé. Cette amitié n'est plus. Mais elle ne mérite pas de s'inquiéter pour moi. C'est la moindre des choses. Dix ans d'amitié de fini, c'est peut-être mieux ainsi.

Lundi dernier, en plein après-midi, ma sœur me dit à travers la porte qu'elle sort avec mes parents. J'ai été surpris d'apprendre que c'était pour la crémation de grand-mère. Je pensais que tout avait été fait le samedi. Au moins, je sais finalement si c'était un enterrement ou une crémation. Ayant la maison pour moi, j'en ai profité pour aller dans le jardin. Plusieurs mois que je n'avais pas pris l'air. Enfin, c'est un bien grand mot, je suis rentré au bout de trente secondes

Ils m'ont laissé la maison pour une deuxième fois, mercredi ou jeudi. J'ai pu encore sortir de ma chambre. Je suis aller à la buanderie pour changer de serviette de bain, et j'ai trouvé le bonnet de grand-mère. Il avait été lavé car il n'y avait plus de cheveux blancs dessus. Cela m'a réchauffé le cœur de l'avoir retrouvé. Je l'ai pris et je le garde dans ma chambre. Cela me fait un pincement au cœur à chaque fois que je le tiens dans les mains, mais cela m'aide à faire mon deuil finalement.

Ma sœur a des manières invivables. Elle monte les escaliers d'un pas lourd, claque les portes sans arrêt. Elle a fait du rangement dans les placards de son ancienne chambre. Quel boucan! Juste derrière le mur où se trouve mon lit. Je dors vraiment mal depuis quelques jours. J'avais bien envie de lui crier dessus mais je me suis abstenu. Cela fait plus d'un an et demi que je reste muet et cela ne va pas s'arrêter.

Il y a quelques heures, j'ai vu que mon frère m'avait adressé un mail. Ma famille a décidé que demain, dimanche donc, ma porte sera forcée quoi qu'il en coûte. Encore ma sœur qui est venu mettre son grain de sel. Pourquoi elle ne s'occuper pas de ses affaires? Les deux fois où ils ont tenté de forcer ma porte, c'était suite à la venue de ma sœur, ou à une conversation téléphonique avec elle. C'est bien la première fois qu'ils me préviennent. Je ne me rappelle plus quand était la dernière fois, il y a six mois? Un an? Ils ont réussi à l’entrouvrir. J'ai pu la refermer grâce à mes cris uniquement. Cette fois c'est différent, mon frère et ma sœur seront sûrement présents. Je panique vraiment. J'ai anticipé et j'ai mis des meubles pour me barricader. Ils ont l'air bien déterminé à entrer dans ma chambre. Cette fois, je suis impuissant, et crier ne marchera pas.

Je ne sais pas quoi faire. Laissez-moi dans ma bulle! Je ne supporterai pas de vivre dans le monde extérieur, autant ne plus vivre du tout.