Début août je suis allée passer quelques jours chez mon père. Une fois arrivée je me suis retrouvée à discuter avec lui dans la cuisine. Il faisait chaud et j’étais de mauvaise humeur. Je répondais brièvement à ses questions, je n’avais pas particulièrement envie de venir chez lui donc j’étais plutôt énervée et la chaleur n’arrangeait rien. Lui était paisible et souriant, comme toujours. Puis, ma belle-mère a débarqué dans la pièce avec mon petit (demi) frère, Medhi, qui a 4 ans. Le petit s’est alors mis à crier et à taper sur la porte. J’ai soupiré et j’ai trouvé qu’il devenait de plus en plus insupportable. En plus il a 4 ans et il ne dit encore aucun mot de français, il parle un autre langage. J’ai fait savoir à mon père mon agacement. Il m’a alors regardée en souriant et il a dit : « On vient d’apprendre qu’il est autiste... » Je ne sais plus ce que j’ai répondu. Sur le moment je n’ai rien ressenti de particulier. Je me suis juste dit que ça expliquait bien son comportement : le fait qu’il ne parle pas, ses cris et ses fixations.
On est ensuite allé déjeuner sur la terrasse. A la fin du repas, pendant qu’on débarrassait la table, Medhi a attrapé une assiette et a tenté de la balancer mais sa mère l’en a empêché. Le petit a ensuite essayé d’attraper d’autres choses pour les balancer et ma belle-mère a alors fortement élevé la voix. Après s’être fait gronder, Medhi est parti dans le salon et il s’est mis à se cogner la tête contre la porte de l’armoire. Mon père a couru pour l’en empêcher.
Un peu plus tard dans la journée, on buvait du thé et mangeait quelques gâteaux quand il a encore essayé d’attraper des objets sur la table. Le problème est que dès qu’il attrape un objet il le jette ensuite violemment et n’importe où. Epuisée, sa mère s’est vraiment énervée cette fois-ci. Elle lui a dit de monter dans sa chambre. Le petit s’est calmé et il a longuement regardé sa maman, il avait les larmes aux yeux. Puis il est parti en courant monter dans sa chambre.
Ce regard qu’il a eu avant de s’enfuir… Ca m’a tuée.
En fait, il fait des fixations sur les objets. Il les prend et les balance. Parfois, on est forcément obligé de l’en empêcher, comme quand il attrape un verre ou une assiette. Dès qu’on tente de l’arrêter il se met à hurler. Dès qu’on le repousse il va tenter à tout prix de s’emparer d’un autre objet. Il n’y a rien à faire. Tant qu’il n’a pas balancé son objet il pleure et il hurle à en faire peur. Quand il n’atteint pas son objectif il va se cogner la tête contre l’armoire, ou alors il se griffe le visage, comme s’il se punissait.
Quand le petit n’en finit plus d’hurler et de pleurer, mon père le prend, il l’attache dans son siège auto et ils partent faire un tour en voiture. Parfois ils s’arrêtent pour marcher un peu dans la forêt.
Etre en voiture le calme immédiatement. Un peu avant que mon père me ramène chez ma mère Medhi était dans un état pas possible. Mon père l’a alors pris avec nous dans la voiture. Dès qu’il l'a installé à l’arrière le petit s’est transformé. Il est resté silencieux pendant tout le voyage. Il paraissait apaisé.
D’ailleurs à chaque fois que mon père propose de sortir ou de prendre la voiture Medhi court tout de suite vers la porte d’entrée avec enthousiasme.
Pendant ces quelques jours j’ai bien vu que c’était épuisant de s’occuper de lui. Mon père reste cependant souriant et détendu, ma belle-mère a tendance à perdre un peu plus vite patience, et je la comprends.
Je suis triste en pensant à Medhi, et mon cœur se serre encore plus fort quand je pense à mon père.