journal d'un pilote français

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Archive du journal au 27/12/2014.

Sommaire

une vie à 900km/h

17 mars 2009 à 19h15

Embarquement terminé, avion armé...moteur gauche en route, le moteur droit se lance dans un vrombissement assourdissant pour les agents de piste....les 12 tonnes de poussée du CFM56 de l'airbus A320 commencent à pousser les 60 tonnes de l'appareil. A bord, 156 passagers; l'avion est quasiment plein. Un peu plus de 2 tonnes 8 de fret et de bagages. Je jette un coup d'oeil dehors...tempête de ciel bleu! Le captain me demande si je suis près. Je répond d'un hochement de tête! Je me répète les procédures et actions avant décollage. Il est le pilote aux commandes, et annonce " briefing avant décollage", ce qui signifie que je dois lui rendre compte des paramètres du jour, ainsi que les performances de notre avion, en fonction de la météo, de la piste, et de son état. Je commence donc par lui confirmer notre masse, notre vitesse de décision, puis de rotation, et les diverses vitesses importantes qui doivent etre intégrées dans nos têtes, ainsi que les caps et routes aériennes imposées...

A peine 5 minutes que l'avion a quitté le parking, et nous voila déjà alignés sur la piste. "Autorisez décollage piste 26 droite, le vent 270 degrés, 8 kt ( 15km/h), rappelez en montée vers le niveau 100" ( 10 000 feet, 3 300m).On a le feu vert de la part de la tour de controle...Le commandant de bord annonce TOGA, pour take off and go around, soit la poussée maximale disponible que l'appareil puisse nous donner pour le décollage. A peine 15 minutes après, on atteint le flight level 310, soit 31 000 feet pour les avertis, ou à peu près 9 600m pour les néophytes. Vitesse de croisière ce jour Mach 0.76. Ca avance vite!

Tout défile si rapidement...les décisions, les actions à entreprendres, même le paysage, du haut de nos 10 000mètres défile à la vitesse grand V.

Nous voila donc en croisière, l'heure pour nous de casser la croute! Je laisse le choix à mon chef de choisir ce qu'il veut manger! Et oui, les pilotes ne mangent pas la même chose, de façon à ce qu'ils ne subissent pas tous les deux une intoxication alimentaire...simple précaution...! L'hotesse vient récupérer nos plateaux. " un petit café les gars ?" Délicate attention!

Le vol se termine...50 minutes sont passées, nous voilà arrivés à destination... 800 km parcourus en moins d'une heure... à peine 45 minutes de " pause", le temps de décharger l'avion, et de ré-embarquer de nouveaux passagers...pour un retour à notre aéroport de départ! Voici un aller et retour de 1600km réalisé en un peu moins de 3h. On appelle ça une rotation dans le jargon aéro...on en fera 4 ce jour là...et oui, c'est ça la vie de pilote!

Crazy life!!!!!!

19 mars 2009 à 21h50

Demain, c'est le printemps. Un pas de plus vers des journées plus longues, plus ensoleillées! Et un pas de plus vers l'augmentation du trafic aérien!

Là haut, c'est déjà saturé! Pour vous donner une idée, c'est bien pire qu'en plein rush hour sur le périph' parisien! Rien qu'à Paris, on arrive à avoir plus d'une heure d'attente en l'air pour pouvoir atterrir! Il y a des avions qui montent, qui descendent, qui transitent, et ce, dans tous les azimuts et pour toutes les destinations! Je n'imagine même pas le boulot et la pression qu'encaissent les controleurs!

Il m'arrive parfois de pouvoir identifier la compagnie ainsi que le type de l'avion que nous croisons en vol! Mon radar T-CAS, chargé de répertorier les avions pouvant entrer en conflits avec le notre, enregistre sans arrêts des 10 ène de spots! Ne vous inquiétez pas, ça ne reste qu'informatif, et rares sont les fois ou l'on doit intervenir!

Le ciel est découpé en "airway", des routes aériennes. Elles ne changent que très rarement. Par exemple, pour un paris/Perpignan, il m'arrive fréquement d'empreinter la même route. Sur cette route, nous sommes plusieurs à se suivre, que l'on aille au même endroit ou non...L'été, avec l'augmentation du trafic aérien, il arrive que 4 ou 5 avions de la même compagnies se suivent, ou se croisent sur le chemin du retour. C'est impressionant de n'entendre que les mêmes indicatifs de compagnie sur la fréquence! Je l'ai beaucoup constaté avec Easy jet, et ryanair. Je ne cite pas air france, puisqu'en france, cela parait logique...

Levez la tête, un jour ou il fait beau, et comptez le nombre d'avions que vous y voyez....se sera impressionant proche des grandes villes ( Paris, Lyon, nice, Toulouse), là ou beaucoup d'avions survolent les aéroports internationaux, et vous comprendrez l'état de saturation que connait le ciel européen!

Par exemple, d'autres chiffres sont révélateurs: chaque semaine, air france effectue 20 000 heures de vol, sur un peu moins de 400appareils! C'est énorme! Ils font les trois 8 dans le ciel! Charles de Gaulles fonctionne 24h sur 24! Des avions y décollent et s'y posent sans cesse!

Donc, avec la venue du printemps, et bientot, de l'été, nous allons de nouveau devoir accumuler les retards, les attentes...et gérer ça au mieux pour que nos passagers ne subissent pas tout ça!

         :-)  It's so awesome to fly  :-)

crash aérien

23 mars 2009 à 21h25

J'ai appris aujourd'hui le crash du fedex au japon, et celui du pilatus aux états-unis...

Pour le Fedex, il semblerait d'après les images ce soit une approche rapide...un rebond puis un piqué un peu violant et un virage par la gauche trop prononcé...le vent était apparement violent, de l'ordre de 80km/h. Les deux pilotes étaient âgés de 40 et 50 ans. On en sera plus dans les jours à venir. Quand au pilatus, je n'ai pas eu échos des faits...

Malheureusement, aucun pilote n'est à l'abris de ce genre d'accident. Nous sommes formés pour nous prémunir de tout ça. Régulièrement, nous nous entrainons à ce genre "d'exercice" pour palier au danger qui existe. Les choses vont parfois trop vite...N'oublions pas que les avions de ligne font en moyenne entre 19 et 450 tonnes à l'atterrissage...et qu'ils filent à près de 300km/h au touché des roues. Ce sont des chiffres qui reflètent quand même l'ampleur du boulot des pilotes.

Pour autant, la réglementation impose une formation stricte, poussée, et couteuse pour les compagnies. Elle le sera toujours moins qu'un crash. Donc, elles ( les compagnies) continueront dans le sens de la sécurité des vols. C'est qui fait que le transport aérien est, et restera le transport le plus sur .

En moyenne, la formation d'un pilote coute 150 000€. Ca comporte la formation théorique du pilote ( 9 mois à tant complet), ainsi que les heures de vol aux différentes phases de la formation. ( apprendre à voler de nuit, sans visibilité...apprendre à voler en équipage, et sur des machines massives et bourrées de technologie , les vols sur multimoteurs, ect...)
Le mot d'ordre à l'heure actuelle, c'est une formation rapide et efficace. Attention, rapide ne veut pas dire baclée! La crise étend ce qu'elle est, les pilotes sont choisis lors de sélections très strictent, encadrées par des psychologues, et des professionnels du milieu. Les qualités recherchées sont celles d'un commandant de bord. Pas le droit à l'erreur!

Une fois les sélection réussis débute la formation. Ca avance vite. Un pilote est formé en moyenne en 2 ans et demi, en partant d'une expérience 0. Les vols s'enchainent, les tests aussi. Un test raté, et c'est souvent la porte. Il est donc certain que l'on arrive pas aux commandes d'un boeing ou d'un airbus par hasard. Il n'y a pas ou peu de chance que quelqu'un passe entre les maille du filet! Et si c'est le cas, il n'ira de toute façon pas très loin! Il n'aura d'ailleurs même pas l'occasion d'emporter des passagers. Car, on a une devise dans le milieu: " dans le doute, il n'y a pas de doute". Nous sommes formés pour lever les doutes quelque part. Si il en persiste un, on l'écarte. Lors de la formation d'un pilote, si on a un doute...

Donc, je ne pense pas qu'il faille s'inquiéter de prendre l'avion. Le risque 0 n'existe pas, certes, néammoins, on s'y rapproche de plus en plus!

Pour celles ou ceux qui ont des questions, vous purrez dès à présent me joindre à cette adresse mail:
pilotefrancais@gmail.com

la naissance d'une passion

2 avril 2009 à 22h29

-"Mesdames et messieurs, bonjour, bienvenue à bord de cette airbus A319. Mon copilote et moi même sommes heureux de vous acceuillir sur ce vol a destination de Djedda. Le temps de vol sera de 5h30 minutes, quelques petites turbulences seront à prévoir lors de la croisiere. Il fera 27 degrés à notre arrivée avec un ciel clair. Nous vous souhaitons un agréable voyage en notre compagnie." Mon commandant de bord raccroche le PA, public adresse, et prend le micro pour contacter le sol:
-" le sol du post, prèt pour le numéros 1?"
- "affirm, prèt pour le 1". On a l'autorisation de l'agent de piste, dit polyvalent, pour allumer le premier moteur. Mon commandant reprend le PA, mais pour s'adresser directement au chef de cabine " la cabine est ready?" une fois la confirmation, il repose de nouveau le téléphone, il reprend l'interphone pour demander l'allumage moteur numéros 2. On égraine en même temps la précodure de mise en route.
Il contact dans la foulé le controleur pour lui dire que nous sommes prèt à rouler.
Tout se déroule bien, les paramètres sont dans le green, les passagers sont installés.
J'égraine ensuite la check list avant décollage.
Il prend une derniere fois le PA " PNC, préparez vous pour le décollage". Cette fois, on y est. Je me réinstalle bien droit sur mon siège. Mon regard porte loin sur cette longue piste de 3km. Une main sur les manettes des gazs, l'autre sur le mini manche. Je les ramène tout doucement en avant, jusqu'à afficher 30% de poussée, pour controler quelques parametres, puis j'affiche full power. Malgré la masse de l'avion, je suis collé à mon fauteuil.

Arrive la vitesse de décision( V1)...une panne avant celle ci, on arrete le décollage net, une panne après V1, on continu le décollage, feu moteur ou pas, on poursuit...là, tout est ok, mon commandant annonce d'une voix sèche " on continu".

Arrive Vr, vitesse de rotation, je tire tout doucement sur le mini stick, et le nez de l'avion s'élève, puis toutes les roues quittent le sol.

V2, on rentre le train, puis au fur et a mesure, les volets.
Nous voila repartis pour une nouvelle destination. Je regarde encore une fois au loin, mais cette fois ci, c'est le soleil que je vois sur l'horizon. Le ciel est orangé à bleu. Pas un nuage, pas une turbulance. Des dizaines de traces blanches filent derrières les avions. C'est magnifique.

Pendant la croisière, un enfant demande à l'hotesse si il peut venir voir le cockpit. Celle ci vient nous demander l'autorisation qui sera bien entendu donnée! Il entre, les yeux pétillants de bonheur, éclairés par des dizaines de boutons de diverses couleurs: bleu, jaune, rouge, orange, vert...son père l'accompagne, il nous confie que c'est la premiere fois qu'il va dans un post de pilotage. Mon commandant leur propose de faire une partie du vol de croisière avec nous. J'adore partager ma passion. Peut etre fera t-il comme moi, pilote...je me souviens moi aussi être rentré à 4 ans dans un post de pilotage...depuis ce jour là, je n'ai jamais voulu faire autre chose! et je me souviendrai toujours de ce commandant de bord qui ma gardé avec lui pendant la croisière...je ne l'ai jamais revu depuis...peut etre qu'un jour je le retrouverai comme collègue de boulot, dans le même cockpit...! Ca ne fais que 18 ans après tout, il devait à peine en avoir 40 à l'époque!

C'est ça la vie...un rien peu vous changer l'existance! J'espere en avoir fait autant pour ce pti bonhomme

barcelone

4 avril 2009 à 22h39

Vivement que j'y retourne! Prestige congress hotel, resto et pub...

Autant la vie de navigant est parfois complexe, stressante, autant on y trouve des avantages! Et je dois avouer que les hotels que l'on nous réserve sont vraiment chouettes: Hilton, sheraton, prestige congress hotel....!

mauvaise météo

8 avril 2009 à 22h51

Nous voila à 33 000 feet, preque verticale clermont ferrant, en route pour Perpignan. Temps à destination: gusting 45 , atterrissage en piste 33, comme bien souvent, par vent de travers! Ca va être sportif! 90 km/h de vent de nord nord ouest, avec le canigou pas loin, les reliefs au nord du terrain, c'est des turbulences assurées!

Je suis le pilote en fonction, c'est à dire que j'ai l'avion en main. Le commandant me brief sur l'approche et l'arrivée, et me demande si j'ai des questions. Aucunes! Alors on y va! Je débute la descente. J'ai en tête qu'il pleut sur perpignan, que le plafond est bas, 900 pied ( 300m), donc ça va etre une approche en quasi totalité à l'aveuglette! Heureusement, grace mes écrans, je peux savoir exactement ou je me situe sur le plan de descente: savoir si je suis trop haut ou trop bas par rapport à la pente d'approche prévue, et trop à gauche ou trop à droit de la piste.

Concernant notre vol, nous sommes légers. Peu de passagers, peu de fret, peu de bagages...bref, un vol bien calme! De l'avance au départ, un vent favorable durant la croisière, donc encore plus d'avance à l'arrivée. Nous devions nous poser à 14h20, il est 13h50, et nous sommes posés dans 10 min grand max. Je fais une descente rapide que je termine avec la sortie des aérofreins. On est sur le loc puis le glide, volet full, trains sortis, avions stabilisé, " on poursuit" annonce mon captain. Je suis un peu rapide au seuil de piste, mais je me corrige de suite. Le vent tend à me faire partir sur la droite, alors je compense en mettant du "pied" à gauche. Les rafales sont plus importantes qu'annoncées à l'ATIS ou sur la fréquence par le controleur. Ca bouge pas mal! Les reliefs alentours causent de nombreux rabattants! L'airbus se balance de gauche à droite, mais je corrige au moindre écart. Mes roues touchent le point d'impact comme prévu, nikel! Reverse, et on laisse rouler un peu l'avion, on a encore un peu de piste...la bretelle de sortie est tout au bout de celle-ci, on a le temps! Mon chief me félicite pour cette approche et se poser, car, il le reconnait, c'est un terrain difficile! Je suis plutot content de moi...! Welcome to Perpignan Rivesalte :-)

L'avantage de ce métier, c'est qu'à chaque vol, on sait que l'on réussit une mission! Celle d'amener les passagers, l'équipage, et l'avion à destination sans soucis. Et ça, intellectuellement, c'est gratifiant! Et c'est ça qui me plait le plus!