dystopies

Un journal de Journal Intime.com

Archive du journal au 11/10/2018.

Sommaire

J'ai souvent peur que tu meures

29 février 2016 à 23h02

Chaque fois que je frôle la mort, de près ou de loin, je vérifie si tu n'y es pas.

Tu m'as demandé récemment si, parfois, les gens qui m'entourent, ou même les passants, faisaient eux aussi objets de ma contemplation avide, désireuse, jamais rassasiée. Tu m'as demandé si je regardais les autres comme je te regarde.

Les uniques fois où je me suis arrêtée aux défilements de passants étrangers, c'était pour vérifier si ce n'était pas toi. Je n'ai pas ce questionnement à la vue d'un inconnu qui n'est pas en mouvement. Le déplacement et les cavalcades embrouillent les traits et métamorphosent le visage.
J'en suis venue à me demander si nos visages reprenaient pas leurs forme initiale qu'une fois que nous nous sommes arrêtés, immobilisés. Je me suis demandée si le mouvement ne donnait pas à nos corps une liberté de se métamorphoser à notre insu et que seule la catalepsie privait le le corps de cette liberté.

Peu importe. Tout à l'heure, j'ai aperçu une femme qui partageait tes traits. Elle gisait sur une civière (un lit d'hôpital mobile, comme j'aime les appeler), traînée par des ambulanciers. J'ai couru pour vérifier si ce n'était pas toi dans ce lit, avec le corps à la disposition de la mort. J'ai été rapidement soulagée. Il s'agissait seulement d'une réplique de toi (Je déteste utiliser ce terme (réplique), car cette femme existe indubitablement à l'extérieur de mon regard altéré par la grandeur de tes subtilités et de ta singularité).

J'ai souvent peur que tu meures.

Main gauche de l'artiste, Théodore Géricault