Lundi matin, 8h00 le réveil sonne sur un air de Willam Baldé « Unnnn Rayon de soleil dore sur tes cheveux long… » Aller la journée commence, je grignote quelques biscuits en me pré laçant sur mon douillet matelas d’ 1cm d’épaisseur. J’enfile un fut et à la douche. je sors de ma tente au camping de l’aérodrome d’Orléans St Denis de l’Hôtel, le ciel est bleu et la semaine s’annonce belle. Le sourire s’affiche sur mon visage. Le soleil dans les yeux sous ma douche je pense à ma première journée de vol de la semaine, premier circuit. Quoi de mieux pour se réveiller et avoir la pêche dès le matin !? Arrivée au club j’attrape les batteries de mon fidèle destrier V22. J’ouvre les portes du hangar avec les campeurs de la coupe. Certain ne sont pas encore très bien réveillés. Notre Juju ne vol pas que le jour on dirait ;) (Ahhh, s’il faisait jour la nuit on pourrait voler la nuit). Bref la bonne humeur est au rendez-vous. Les locaux arrivent et on met les planeurs sur la 03 herbes. 10h, le briefing commence, les machines sont en pistes. Le briefing annonce la couleur du circuit et de la journée : St Denis de l’Hôtel, Cerdon, Pithiviers, Montargis, St Denis de l’Hôtel. Un circuit en papillon :
Je trace le circuit sur ma carte avec une élève du club venue assister au briefing par curiosité (profile vélivole !). Tout le monde en fait de même. Chacun discute stratégie, météo, zones à respecter. L’ambiance est studieuse et les gens entre le circuit du jour dans leur PDA. Certains ne sont pas encore à l’aise voir pas du tout (jean alias D14 ou Canard parce qu’il parle bcp à la radio mais les surnoms n’étaient pas encore attribués à ce moment là) d’autres (Gishlaine avec ses 3 ou 4 PDA record woman en onde et Juju ancien participant de la coupe il y a deux ans) parfaitement à l’aise aidant les autres. Moi je n’ai pas de PDA mais un LX (un instrument électronique faisant partie du tableau de bord) bien plus pratique en vol mais mon planeur est en piste… et je ne sais rentrer un circuit que depuis la veille grâce à la mauvaise météo et une doc en anglais pas très pratique à lire. Me voilà donc parti au seuil de piste avec ma doc mon plan de vol mon bob et mes lunettes. Pleins de cumulus partout ! ça s’annonce bien. J’entre mon circuit tant bien que mal car un point de virage n’était pas en mémoire, heureusement que j’avais la doc. Je rentre au club manger puis sieste au camping (un peu de calme avant la tempête ca fera du bien). C’était sans compter le CAP10 et sa préparation de son meeting de voltige. Pas grave, le son est plus doux à mes oreilles que celui du métro parisien. De retour au club, j’embarque dans la « clef USB » (l’imat du remorqueur est F- USB) pour traverser les pistes et rejoindre mon planeur. Prévol je fais le tour du planeur et en revenant au cockpit je m’aperçois d’un gros problème pouvant aller à l’encontre de l’intégrité du vol : Pas d’eau dans ma bouteille et… où sont mes pailles d’or ??? je contacte les hangars par la radio pour me ramener mes biscuits qui sont sur le réfrigérateur du club(tous l’aérodrome est au courant. Ca s’est fait) et Juju avait trop d’eau dans sa bouteille, il m’en donne un peu. 13h00,00 le remorqueur démarre pile à l’heure prévue, 13h02 premier décollage. J’enfile mon para, m’harnache, gesticule pour trouver une bonne position.
Très vite mon tour vient, le câble se tend l’aile est déjà levé. Concours oblige on doit être prêt dès que le remorqueur arrive. Le chef Pi (chef pilote) annonce à la radio ‘Tendu !’. Les galops du remorqueur claquent l’air. La horde est lâchée je roule de plus en plus vite. Check du badin, ça fonctionne, 40, 50 je mets le planeur en ligne de vol, 60, 80 une légère traction du manche je rase la piste tel un flamant rose, 100, 110 l’avion décolle à son tour, on gagne de la hauteur, check à l’alti… ca fonctionne et de deux, le vario s’affole et de trois. De quoi assurer le vol en sécurité. Les 500 mètres sol sont vite atteints, je me largue me voilà livrer à moi-même. La première ascendance est juste à côté de moi. je l’enroule, je recentre mais le vario ne semble pas vouloir me donner mieux qu’1m/s. Je m’attendais à mieux mais bon tant pis je fais un premier plafond avec ca. Pour tâter la masse d’air c’est suffisant. 900m QNH, je suis déjà dans les barbules tandis que les autres planeurs continu d’être remorqués. Je transite vers un autre planeur en spirale. J’en profite pour régler le LX sur l’écran de navigation et aussi pour me familiariser avec. Les conditions sont petites mais suffisantes avec 4/8 de Cu, sans voile de cirrus. Le chef pilote ouvre la ligne de départ, il est 13h30. Le plafond est a 1000m maintenant et les pompes sont entre 1 et 1,5m/s. Je passe la ligne de départ cap 152° direction Cerdon. En moins de 15mn et 2 pompes me voilà déjà dans la première zone. Jusque là ca marche plutôt bien alors, dans l’enthousiasme je décide d’aller jusqu’à Cerdon même, le centre de ma zone. Dans l’excitation et la concentration de ce premier circuit, les barrières tombes. A ce moment là je quitte mon local, si je retourne en arrière je ne peux plus rentrer directement au terrain. Mais mon esprit est totalement absorber par le circuit je quitte le local sans remords tel un aiglon qui quitte le nid et je ne regarde que ce qu’il se présente devant moi. Il y a des champs posables un peu partout c’est rassurant car j’arrive sur Cerdon et j’ai besoin d’une nouvelle ascendance je suis aux alentours de 750m. Un gros cumulus se trouve devant moi, il est étalé et sombre. Je tourne Cerdon en même temps que je me trouve sous le cumulus. L’ascendance que je souhaitais n’arrive pas. Je finis par trouver un 0.5m/s… bof je remonte un peu mais l’ascendance est mauvaise, pas constante, je remonte un peu mais retombe. Je cherche un peu à côté. Un autre planeur me rejoint. J’ai beau m’appliquer dans ma spirale, ca ne monte toujours pas. J’observe autour de moi pour comprendre et voir où elle se trouve. Cela fait plus d’un quart d’heure que je suis au dessus de Cerdon quand je réalise… d’où je viens le sol est ensoleillé et de l’autre, tout est sombre 8/8 de couverture… je suis sous un étalement… pas d’ensoleillement pas d’ascendance… pas de bras pas de chocolat. Quel couillon ! c’était pourtant flagrant et je n’ai rien vu. Le stress m’envahi, je me sens fautif, Quel Con ! je m’applique pour monter le mieux possible mais je me rends compte que je me suis déconcentrer je suis dans une descente et dans une spirale mentale infernale. Il faut que je me sorte de là. Je me calme et me recentre intérieurement. Je commence à accepter l’idée de la vache. Je suis à 700m, je regarde les champs. Pas de problème il y en a toujours autant qu’il y a 15mn, ils sont toujours là. Finalement l’idée de la vache me rassure et je préfère m’y préparer tôt. Une idée nouvelle me vient à l’esprit. Quitte à se vacher, autant se vacher en avançant ! Oui cette idée me plait en plus je suis suffisamment haut pour aller de champs en champs et à travers l’étalement et la brume au loin je peux voir ce qui ressemble à un petit cumulus. Aller, hop, je me dirige vers ce cumulus, je sors de là et regarde les champs. L’air est stable, je ne descends pas bcp, je vole à 100km/h à la finesse max du planeur pour rester le plus haut possible. Le Cu que je voyais devient de plus en plus net. J’ai parcouru la moitié de la distance qui m’en séparait, je suis à 650m. J’ai l’impression de pouvoir cueillir les pâquerettes, je ne peux plus voir le terrain de départ… J’arrive sur le Cumulus. Les autres Cumulus sont loin et je suis à 600mQNH soit j’ai une ascendance soit c’est la vache, J’ai la pression. Je sens que ça gratte (ca turbule), une ascendance se profile, le nuage est isolé pas très gros et l’ensoleillement est bon. Reste à voir si elle sera bonne et constante. Le vario passe en positif, 0.5… 1m/s j’enroule et ça continu, 1.5m/s , ça se profile bien pour moi. Je passe un coup en négatif. Je recentre le vario m’indique 2.5m/s. Je suis tirer d’affaire, l’intégrateur m’indique un 2.0m/s… Ouf. Quelques minutes plus tard, me voilà au plafond, je me sens comme le roi du pétrole. J’avance maintenant pour traverser la Loire avec un badin de 140km/h, un nuage se profile en bordure de la forêt d’Orléans. J’arrive du coté de St Benoit sur Loire, la pompe à l’air prometteuse à plus d’1m/s mais finalement j’obtiens qu’un 0.3 0.5m/s intégré et je suis obligé de me refaire. En montant ca devient un peu meilleur et je réussi à faire un plafond à 1050m mais je me suis fait déporter de quelques km.
Je continue ma route vers Pithiviers. Mais rapidement je suis obligé de reprendre une ascendance toujours de le secteur de St Benoit… Et en plus il y a la forêt à traverser avec un plafond de 1000m difficilement atteignable. Mais au bout de 3-4 pompes je finis par faire le plafond en bordure de forêt. Toujours à l’affût des champs, beaucoup plus rare, je traverse la forêt. Et là surprise… ca transite bien je trouve même une bonne pompe à 1.8m/s en plein milieu au dessus d’un champ. On dirait bien que les conditions changent et s’améliore. Il aurait fallu passer rapidement dans le cercle de Cerdon et partir vers Pithiviers. Ce qui est fait est fait, je suis là pour faire des erreurs et apprendre. Avec le stress qui s’évacue, d’autres idées me viennent à l’esprit… Boire, Manger. J’attrape ma bouteille et boit quelques gorgées. Mais où sont mes pailles d’or ? Ah les voilà tout au fond derrière mon coude droit. Je me contorsionne et attrape du bout des doigts mon paquet de biscuit. Je me délecte du doux croustillement à la fraise et je profite du paysage, de ses contrastes entre forêt et champs comme un spectateur au cinéma avec du popcorn. Quelques secondes de repos cela fait du bien et me permet d’avoir les idées claires. En parlant d’idées claires, la réalité me rattrape vite et je observe les cumulus afin de détecter quel cheminement me sera le plus favorable. Le temps est nettement meilleur et le plafond a monté à 1200m. Plus le temps passe plus le temps passe vite. La routine s’installe, je gère plus facilement le stress quand j’arrive vers les 750m. Je passe Pithiviers avec ses éoliennes à l’ouest qui tournent lentement, c’est presque hypnotisant… comme les conditions sont bonnes je continue jusque vers Malesherbes. Je reprends une pompe avant de me diriger vers Montargis. Les kilomètres défilent vite. Le cheminement vers Montargis est bon. 15-20 minutes plus tard, à mi-chemin en Pithiviers et Montargis, une rue se profile devant moi à 1300m d’altitude. Je fais le plafond. Les Cu sont tellement bons qu’il faut que je mette du manche au tableau et prendre de la vitesse pour ne pas sortir les soupapes ! 5 minutes plus tard j’arrive sur mon point de virage, je me cale sur la fréquence du terrain. Je passe le bonjour et je m’annonce en approche pour la verticale… Pas de réponse. En fait il n’y a pas d’activité. Tant pis. Je suis au 2/3 du parcours toujours en l’air, au fond de moi je suis fier J’aurais aimé parler à la radio avec d’autres club pour ma première nav en campagne. J’arrive vers les 700m en passant le terrain mais depuis la sortie du cheminement je visais un Cu juste après mon point de virage. Cela me remonte à 1050m. C’est un peu moins bon mais ca chemine assez bien. Je me cale entre 80 et 100km/h pour chuter le moins possible et profiter des petites ascendances sans m’arrêter. Je tiens 10km sans spiraler et en ayant perdu 50m de hauteur. Un beau Cu me monte à 1250m je suis à la moitié de la dernière ligne droite. Encore une pompe et ma rentrée sera très probable. J’avance calmement à 110km/h la forêt se présente face à moi. Je cherche les Cu pour monter avant de la franchir. Je trouve une petite pompe à 0.5m/s je monte de 100m mais je perds du temps. Je rebrousse chemin et trouve une bonne pompe et fait un plafond à 1300m. Mon calculateur me dit que je suis au dessus du plan pour une rentrée direct ! Et c’est ce que je fais. Je m’arrange pour passer la ligne d’arriver avec mes 500m sols comme l’ont exigés les organisateurs. Je passe mon message radio pour m’annoncer à 10km du terrain. Je passe la ligne d’arrivée ! Ca y est j’ai bouclé la boucle. Je repense rapidement à l’aventure de la journée le sourire aux coins des lèvres. Ce matin en me levant je ne pouvais pas imaginer cette sensation de satisfaction personnelle de s’être dépasser soi même en respectant les règles de l’art. Au débriefing j’apprends que j’ai le record de distance de la journée avec 178km. Pour un premier circuit c’était l’objectif que je m’étais fixé. Cela m’était égale d’avoir été l’un des plus lent avec une vitesse respectable de 46km/h. Pas mal, en ayant mariné sous un étalement au tout début! Par Bertrand Vélivole à Coulommiers.